Cette édition des Journées cinématographiques s’attachera à offrir une balade dans des territoires rares, à la rencontre de cinématographies qui font la part belle aux regards indépendants et « satellites » du cinéma dominant. À travers plus de 50 séances et de nombreuses rencontres en présence de cinéastes, la programmation proposera d’ouvrir en grand nos regards et de bousculer nos habitudes de spectateurs.
Aux côtés de KEN LOACH, invité d’honneur, et de nombreux cinéastes comme Annabelle Aventurin, Alain Cavalier, Marcelo Gomes, Elina Löwensohn, Laura Poitras, Marcello Quintanilha, Kirill Serebrennikov, Alexandra Stewart, Marie- Claude Treilhou, Patrick Wang, Saul Williams et Fronza Woods ; Françoise Romand présentera le samedi 4 février à 18h à l’Écran St Denis son film phare Appelez-moi Madame précédé de son tout dernier court-métrage : Ma vie de merde.
Françoise Romand invitée d’honneur de la 17ème rencontre FILMS FEMMES MÉDITERRANÉE et offre un Ciné-Romand en clôture le 3 décembre.
La 17e édition des Rencontres Films Femmes Méditerranée vous donne rendez-vous à Marseille, puis en région, autour d’une quarantaine de films, longs et courts métrages, fictions, documentaires et films d’animation, tous singuliers et choisis dans l’énergie collective grâce à la diversité de leurs regards.
Trois longs métrages ainsi que trois courts métrages de Françoise Romand sont proposés lors du festival de cette mouture 2022.
La programmation questionne des sujets sensibles tels que le monde de l’adolescence, le poids des sociétés patriarcales, le passé colonial. Elle fait la part belle aux récits initiatiques et aux fresques familiales, où souvent l’humour et la sororité font contrepoids aux crises.
Avec l’envie de travailler les mémoires qui traversent les territoires méditerranéens, la programmation parcourt l’Algérie, la Tunisie, le Liban, la Palestine, l’Arménie, la Grèce, la République Tchèque, la Bosnie-Herzégovine, l’Italie, la France, l’Espagne et le Portugal.
C’est dans ce contexte que Françoise Romand et ses dérapages contrôlés sont mis à l’honneur. L’équipe de Films Femmes Méditerranée décrit la cinéaste comme « l’autrice de documentaires burlesques, intimes et politiques qui prouvent avec maitrise que l’aventure documentaire n’est pas une affaire de sérieux ». « Tout ça, c’est du cinéma » comme aime à le rappeler l’artiste.
Un Ciné-Romand pour clôturer les rencontres
Le samedi 3 décembre, une expérience cinématographique inédite.
Pour offrir un bonus aux spectateurs à la fin des Rencontres, Fims Femmes Méditerranée a choisi de réactiver une aventure cinématographique en appartement expérimentée depuis 2007 à Paris et Bagnolet par Françoise Romand. Elle interroge le système de diffusion des films et la réception des spectateurs et spectatrices, mélangeant indiscrétion et vraie passion pour la rencontre. C’est dans les tours Labourdette, que ce dernier rendez-vous de « Dérapages contrôlés » aura lieu, le choix du site étant guidé par l’originalité de cette cité d’habitation à la sociologie complexe où des souvenirs d’enfance de la cinéaste sont encore vifs.
Interrogeant les lois de l’hospitalité et le cinéma à l’ère de sa diffusion numérique, Ciné- Romand est une mise en abyme des précédents films de Françoise Romand qu’elle sort de leur carcan et ramène comme un home-movie « chez l’habitant ».
Des anges, membres de FFM, ont chacun·e en charge un petit groupe de spectateurs, qu’ils conduisent chez les habitant·e·s. On pousse la porte, les occupant·e·s sont là. On les ignore, il ne s’agit pas d’une visite guidée des appartements… Dans un coin un écran diffuse un des films de Françoise Romand que l’on regarde un quart d’heure puis on se glisse dans un autre appartement, ainsi de suite pour la durée d’une séance de cinéma. Étrange expérience qui vous met dans la peau de l’homme ou de la femme invisible et aussi qui vous place devant une table de montage. Vous ne savez plus où orienter vos yeux et vos oreilles : l’écran de télé, la vue, l’architecture des lieux, la décoration de l’appartement, ou la vie intime des habitants ? Tous les codes de la convivialité́ sont chamboulés. Qui observe qui ou quoi ?
The Institute of Contemporary Arts de Londres et le collectif La Clef Revival accueillent la cinéaste Françoise Romand pour la projection d’Appelez-moi Madame lors de l’évènement (G)Round Up !
(G)Round Up ! Une expérience unique du 28 au 30 octobre 2022 à Londres
Projections de films, symposiums, ciné-repas et autres moments de partage seront proposés par le prestigieux ICA de Londres pour soutenir le cinéma militant.
Il s’agit d’un programme en quatre actes, destiné à mettre en avant l’importance des moyens alternatifs et collectifs d’exposer des films et ainsi soutenir Le collectif la Clef Revival dans son projet de rachat du cinéma La Clef, un cinéma à but non lucratif, dans le quartier latin de Paris qui s’était fermé de manière controversée en 2018. La Clé Revival avait investi illégalement le lieu pendant deux ans pour lui rendre son objectif initial avant d’en être délogé en mars 2022. Les membres du collectif appellent à l’aide pour pouvoir racheter le cinéma. Ils ont déjà collecté plus de 160 000€.
Appelez-moi Madame sera projeté lors du 4ème acte de cet évènement (G)Round Up ! le dimanche 30 octobre lors de la clôture.
Le film de Françoise Romand était le premier qui abordait une histoire transsexuelle en France dans les années 80. Sa projection dans ce lieu mythique qu’est l’ICA of London symbolise le soutien spectaculaire reçu par le collectif La Clef Revival de la part de communauté cinématographique.
Appelez-moi Madame, un des premiers documentaires-fictions de Françoise Romand, produit pour TF1, alors télévision publique, a fait l’effet d’une bombe en 1986. Il a reçu le prix Golden Gate du Festival de San Francisco.
Voici son pitch, on comprendra facilement pourquoi il a toute sa place dans la programmation de (G)round Up ! mais vous pouvez décider de passer ce paragraphe si vous préférez bénéficier de l’avalanche de « moments » inattendus proposés par un montage subtil et les personnalités complexes des acteurs. Dans un petit village normand, vivaient un couple de communistes avec leur fils adolescent. Le mari, défraie la chronique quand, à 55 ans, revêtu d’une robe, il fait le tour des petits commerces en disant que maintenant il s’appellera Madame. Sa femme, directrice de l’école maternelle, l’a soutenu dans sa transformation aux yeux de tous. Le tournage a été à la fois délicat et constructif, la cinéaste se souvient : « Poétesse, Ovida Delect, devenue transsexuelle, était très inquiète de son image. Toutes les nuits, elle écrivait des textes que je devais écouter religieusement dès mon arrivée. Alors, je lui ai demandé de présenter le film dont elle rêvait à la caméra. Se baser sur ses rêves et ses fantasmes m’a inspiré d’autres séquences… »
À propos de Françoise Romand, le cinéma dans les gènes…
Ciotadenne dont la famille a marqué l’histoire de La Ciotat avec un grand-père maire et un arrière-grand-père ayant tourné dans les premiers films des frères Lumière dont « L’arroseur arrosé ». Son autre arrière-grand-père était lui chef de gare lors du tournage du célèbre « Arrivée d’un train en gare de La Ciotat » de 1895. À croire que le cinéma fait partie de l’ADN de Françoise Romand.
Françoise Romand est diplômée d’une grande école de cinéma, l‘IDHEC (Institut des Hautes Études Cinématographique) devenue la FEMIS, (l’école nationale supérieure des métiers de l’image et du son) en 1988 et a enseigné son art, le cinéma, à Harvard.
Son film de promotion de l’IDHEC « Rencontres… » dont elle dit « que cet essai oublié portait en germes tout ce que j’ai exploré par la suite, documentaire fiction où le réel interroge la fiction, autofiction, happening. »
Elle commence sa carrière professionnelle de réalisatrice avec « Mix-Up ou Méli-mélo » où elle élabore une stratégie de mise en scène dans les documentaires, inédit et transgressif à l’époque.
Tourné en 1985, « Mix-Up ou Méli-mélo » obtient une reconnaissance critique aux États-Unis. Après sa découverte par Vincent Canby du New York Times, le critique du Chicago Reader, Jonathan Rosenbaum, le sélectionne premier des dix meilleurs films de 1988 et dans les 15 meilleurs des années 1980 aux côtés de Ridley Scott, Martin Scorsese, John Cassavetes, Chris Marker, Alain Resnais, Jean-Luc Godard.
« Appelez-moi Madame » (Call Me Madame) remportera le même succès et le prix Golden Gate du Festival de San Francisco. C’est un véritable choc à sa sortie à la télévision en 1986.
Au tournant du siècle, elle enseigne le cinéma à l’Université de Harvardoù en liaison avec son travail cinématographique, elle explore les ramifications sur Internet, invente le premier webdoc « IKitchenEye » et organise des happenings sur la scène underground parisienne avec ses « Ciné-Romand » dont elle édite un DVD en 2009.
Un nouveau Ciné-Romand sera réitéré à Marseille le samedi 3 décembre 2022 à la suite du Festival Films Femmes Méditerranée où certains de ses films seront projetés.
Son autofiction, « Thème Je « , évoluera pendant 10 ans en différentes versions jusqu’à la finale gravée sur DVD.
En 2020, le Prix de la SCAM, (Société Civile des Auteurs Multimédias), le prix Charles Brabant lui est décerné pour l’ensemble de son œuvre.
En 2021, Jonathan Rosenbaum a classé « Mix Up » parmi les 10 meilleurs films de femmes de tous les temps.
À l’avant-garde du « Docu-fiction », Françoise Romand mise à l’honneur au Festival Corsica Doc
Appelez-moi Madame sera projeté lors de la 16ème édition du Festival Corsica Doc intitulé cette année Féminins/Masculins… Fictions/Documentaires à Marignana le mardi 11 octobre à 18h00 et le dimanche 16 octobre à 14h au cinéma Laetitia à Ajaccio.
Tourné en 1985, Mix-Up n’a pas cessé de suscité l’intérêt du public et des critiques. Vous le verrez au travers de cette revue de presse qui commence dès 1986 !
La vod de la semaine. « Mix up ou méli-mélo » de Françoise Romand Découverte d’une cinéaste méconnue, Françoise Romand, dont le premier film, plein de fantaisie et d’inventivité, retrace de façon synthétique l’expérience de deux Anglaises échangées à la naissance par erreur.
Une pépite concise et farfelue à la fois. Publié le Vendredi 19 mai 2023 Vincent Ostria « MIX UP OU MÉLI-MÉLO » DE FRANÇOISE ROMAND. FRANCE, 1985, 1 H 00 A voir sur universcine.com Y a-t-il des cinéastes injustement méconnus? C’est certain. On peut citer le cas de Marcel Hanoun, stylistiquement proche de Robert Bresson, qui n’obtint jamais la reconnaissance qu’il méritait. Mais il en est de plus obscurs encore, dont le statut marginal reste surprenant, eu égard à la qualité et l’originalité de leur travail. Prenons le cas de Françoise Romand, qui tourne depuis 1977, et dont le premier long-métrage, « Mix-up ou méli-mélo », fut produit par la télévision française en 1985. Sur le papier, il s’agit d’un documentaire : il retrace l’histoire de Peggy et Valerie, deux Anglaises du même âge qui furent échangées par erreur à la naissance et ne découvrirent la vérité que vingt ans plus tard. On peut imaginer qu’Étienne Chatiliez s’est inspiré de cette histoire vraie pour sa farcesque « Vie est un long fleuve tranquille ». Grosso modo, la cinéaste met en scène l’histoire in situ avec le concours des femmes échangées et de leurs familles qui, on l’apprend, se connaissaient. Ces personnes témoignent face caméra et jouent des saynètes. Françoise Romand les filme de façon synthétique, ludique, avec un sens du cadre très rigoureux. D’une certaine manière, « Mix-up » est un anti-documentaire car on ne laisse jamais tourner la caméra sans intervenir (méthode Wiseman). Au contraire, les personnages rejouent leur vie, y compris des épisodes de leur jeunesse ; d’autres fois des figurants incarnent leurs rôles lorsqu’ils étaient enfants. À ce travail synthétique tourné en 16 mm s’adjoignent des bribes de films de famille en 8 mm. Il y a dans cette œuvre un caractère net, brut et graphique, dont la folie douce fait le charme irrésistible. En prenant le contre-pied des clichés sur le « cinéma du réel » , en épurant la réalité à sa guise et en la réinterprétant, Françoise Romand invente un nouveau style de cinéma où la vraie vie devient à son tour une fiction, qui permet de sortir enfin de la sacro-sainte routine du documentaire alternant interviews et séquences filmées sur le vif. Nous reviendrons sur cette réalisatrice trop ignorée, trop discrète.
Le documentaire n’aurait pas été le même si je l’avais tournée aujourd’hui.
Françoise Romand, Le Midi Libre, 30 septembre 1997
Curieuse affaire, curieux documentaire, très inventif, très malicieux, qui n’hésite pas à jouer sur le registre de l’humour et de l’histoire à dormir debout.
Jean-Philippe Tessé, Les cahiers du cinéma, décembre 2006
One of the most remarkable and innovative documentaries ever made […].
Jonathan Rosenbaum, Chicago Reader, March 3, 1995
Jonathan Rosembaum, Chicago Reader, Top 10 – The Best Movies of 1988
… « Car c’est un véritable bijou. Tout au long d’un récit passionnant, ce documentaire d’une heure invente une forme unique, ciselée tant par la liberté et l’inventivité d’une cinéaste inspirée que par l’aventure humaine que constitue le film. »
… »A queer, distanced, high-tech style, with carefully composed and balanced frames, symbolic settings and many obviously scripted and staged scenes. There’s a pristine, farcical quality about the style, but its very overcomposed rigor ironically suggests the absurdity of a world where havoc can be wreaked by mere chance, where things simply can’t be controlled. Mix Up is as unique and interesting a documentary as you’re likely to see for quite a while. »
« On est loin, très loin des clichés accolés au mot « transsexuel ». Loin des villes, loin des paillettes, loin de Taïwan. Nous sommes dans un village normand, non loin de Caen. Jean-Pierre a été un jeune résistant, arrêté à 17 ans, il part en déportation, quand il revient il ne pèse plus que 27 kilos. Il milite au parti communiste, écrit des poèmes depuis toujours. Paul Eluard en a lu un lors d’un meeting dans la salle de Mutualité lorsque Jean-Pierre était étudiant à Paris.
Jean-Pierre se marie donc avec Huguette, ils ont un fils, Jean-Noël. Ce n’est que tardivement qu’il réveille et affirme la femme qui sommeillait en lui. Huguette, par amour, l’accompagne dans ce voyage dont elle et leur fils avaient perçu des premiers signes : discrètement, Jean-Pierre s’habillait en femme et s’en allait par les rues du village. Jean-Pierre devient Ovida, c’est aussi son nom de poète. »
« Si certains choix de réalisation comme la texture de l’image accusent l’âge avancé d’Appelez-moi Madame, la liberté de style et de ton dont y fait preuve Françoise Romand comme la décontraction avec laquelle Ovida Delect assume et revendique ce qu’elle est jusque dans ses extravagances donnent à ce film méconnu une modernité rafraîchissante. L’œuvre facétieuse et touchante d’une réalisatrice… Un film qui interroge par ricochet le caractère corseté ou impersonnel de la plupart de « nos » documentaires dits « de société ». »
« …Mise en scène comme mise en situations loufoques et toujours bien senties, qui racontent quelque chose des personnages à la manière d’un psychodrame ; mise en scène au sens plus classique d’une attention toujours tenue pour le cadre et le montage, qui lui fait chercher des angles, des amorces, des broderies formelles qui cassent l’évidence et portent les personnages au-delà de leur histoire, vers une mélancolie parfois, un horizon de grandeur toujours. Epatant. »
… « Françoise Romand filme le réel avec une légèreté et une fantaisie inédites dans la production actuelle. Ses effets à la Méliès invoquent un cinéma des origines, primitif et troublant. Sa signature : des scènes découpées en plans fixes, un peu bancales, où la fiction s’engouffre dans la banalité du quotidien. Ovida et Huguette ouvrent le film en poussant la chansonnette, rejouent la pause d’une photo du passé, s’improvisent animatrices dans un studio de radio… Tout est fabriqué… »
… « Croyez-moi : le dernier plan du film, dans lequel Jean-Pierre-Ovida, en robe de mariée, et sa femme, Huguette, se tiennent par les épaules en nous regardant droit dans les yeux, est une des images les plus tendrement grotesques et émouvantes qu’il vous sera jamais donné de voir, comme au croisement du monde de Fellini et de celui de Gombrowicz. »
Les artistes de street art, Ella & Pitr, affichent leur amour et leurs fantaisies sur les murs du monde. Génération Y, la vie et l’œuvre intrinsèquement liées, ils puisent leur inspiration dans leur vie quotidienne dont les rêves composent une nouvelle réalité pleine d’humour et de tendresse. Ils sillonnent la planète avec leurs deux jeunes enfants, exposant leurs affiches dans les rues ou en galeries, manière généreuse de coller à tous leurs publics. Françoise Romand, inspirée par cette étonnante saga familiale, propose une délicieuse fantaisie montrant qu’il existe mille manières de rendre le monde plus beau à condition de s’en emparer avec l’esprit critique qu’exige toute création.